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Le Paradoxe de la Vie
Axiothérapie®Le Paradoxe de la ViePrinciples of Axiotherapy

Principles of Axiotherapy

Journal of religion and Health, Vol 15 N°4, 1976

 "Principles of Axiotherapy" Traduit par Dominique Novak

Du Dr. Orol Strunk, jr. Professor of psychology at Boston Univercity

 

"Principles d'Axiotherapy"

 

L'Axiothérapie n'est pas une autre école psychothérapeutique à empiler sur la pyramide grandissante de thérapies. En soi, ce n'est pas une approche psychothérapeutique à part entière avec des techniques propres. Elle ne peut pas non plus être simplement classée comme un complément à un suivi psychothérapeutique ou thérapeutique, car parfois elle peut suffire à elle-même. Et il est également vrai que certains thérapeutes pratiquent l'axiotherapie sans même le savoir. 

Autrement dit, l'Axiothérapie est une rencontre interpersonnelle qui porte une attention particulière à la clarification des valeurs spécifiques en jeu dans toute situation problématique, qui demande comment ces mêmes valeurs fonctionnent ou dysfonctionnent par rapport à la réalisation à long terme du moi, et dans quelle mesure elles sont ouvertes à la révision ou la modification du comportement. 

Dans le projet Axiothérapeutique, il y a au moins trois principes qui permettent de faire de l'approche une modalité bona fide. Le but de ce texte est de noter et commenter ces trois principes, et décrire un cas pratique.

 

Principes Axiothérapeutiques

 

Les trois principes d'Axiothérapie peuvent être vus en termes de la légitimité démontrée du concept de valeurs en lui-même, du pouvoir motivant des valeurs, et de l'équilibre de la valeur comportementale comme index d'ajustement.

 

  • La valeur est un élément légitime dans le procédé psychothérapeutique

L'affirmation que les valeurs pouvaient occuper une place centrale dans tout suivi psychothérapeutique était bien plus difficile  à défendre il y a quelques décennies qu'elle ne l'est aujourd'hui. A une époque où l'approche majeure psychothérapeutique était psychanalytique, les valeurs avaient peu de chances d'être considérées sérieusement à part comme des défenses ou faisant partie du procédé d'intellectualisation. Et dans la psychologie courante, les valeurs étaient systématiquement évitées par rapport à la notion naïve d'une science sans valeurs. En partie dû à la troisième Force dans la psychologie américaine et la reconnaissance concomitante que le thérapeute est de plusieurs manières un prêtre séculaire, les valeurs ont émergé comme étant centraux à de nombreuses activités comportementales et sociales, y compris le procédé psychothérapeutique.

Rokeach à systématiquement maintenu que le concept de valeurs tire beaucoup de son pouvoir du fait qu'il traverse toutes les disciplines et qu'il est même utile et opérationnel à travers les cultures. Il voit la valeur comme étant "une croyance durable qu'un mode spécifique de conduite ou de comportement final est personnellement ou socialement préférable à une conduite ou comportement inverse ou contraire ". Les valeurs sont soit instrumentales (modes de conduite) ou terminales (états finaux d'existence). Par contre, les deux ont des composants cognitives, affectives et comportementales et donc font partie intégrante du développement de la personnalité. Il existe suffisamment d'éléments pour indiquer que malgré que les valeurs peuvent être vues de plusieurs perspectives, le siège essentiel du système de valeurs se trouve dans le psychisme humain. Sûrement le fait que les valeurs sont des croyances sur lesquelles une personne agit par préférence ou "sens (significations) perçues comme étant reliés au moi" les rendent infiniment importantes dans toute approche dévouée à l'élévation et au changement, y compris dans le procédé appelé psychothérapie.

 

  • Les valeurs ont un pouvoir de motivation propre

Il se pourrait que,  dans le développement récent et l'acceptation grandissante des théories cognitives de personnalité et de psychothérapie, un tel principe n'aie pas besoin d'être défendu. Par contre, beaucoup d'entre nous ont été élevés et éduqués selon des principes théoriques qui plaçaient une priorité indiscutable sur les procédés affectifs et inconscients, et il est probablement vrai que beaucoup de thérapeutes contemporains ont une approche fixe ou une préférence répandue pour le mode affectif.

Ce sujet assez ancien et par moments ennuyeux n'est pas totalement approprié à l'acceptation ou le rejet des valeurs comme étant des références authentiques dans l'approche thérapeutique ou psychothérapeutique puisque, comme évoqué précédemment, les valeurs ont des composantes affectives et comportementales en plus d'un facteur cognitif. Mais même en tant que système cognitif,  le pouvoir sur le développement personnel est apparent.

Il y a environ 20 ans, Nuttin l'a bien décrit: " On ne peut nier qu'une part importante du comportement humain – individuel et social – est motivée par des structures cognitives (convictions, systèmes idéologiques, conceptions de la vie etc….) Les défis de vie ou de mort sont combattus avec ces structures cognitives comme points de départ ou de but ultime. Ceci nous montre que peu "d'objets" sont plus chargés dynamiquement que ces structures cognitives semblent l'être;"

L'Axiothérapie accepte cette notion comme étant un principe important d'une grande signification dans l'évaluation des valeurs et de leur modification.

 

  • La cohérence entre les valeurs et le comportement peut être vu comme un index à l'ajustement psychologique.

Malgré que la clarification des valeurs spécifiques en jeu dans toute situation problématique soit une phase extrêmement importante de l'Axiothérapie, comme dans tout travail de clarification des valeurs en général, ce n'est que le début du procédé Axiothérapeutique. Il est important d'explorer le véritable degré de cohérence entre des valeurs spécifiques et des comportements spécifiques, car il est supposé que le bon fonctionnement de l'adulte est facilité par une grande cohérence valeurs-comportement.

Quand il existe une incohérence dans le rapport valeurs-comportement – ou quand il existe une trop grande différence entre les valeurs et le comportement, alors apparaît fréquemment des troubles tels que la honte, la culpabilité, l'anxiété etc….

Par exemple, le déni conscient des valeurs engendre souvent de la culpabilité, tout comme la pensée d'une menace future  à une valeur peut engendrer de l'anxiété.

Plusieurs autres conditions stressantes peuvent être le résultat d'incohérences entre les valeurs et le comportement, sans parler de la possibilité de créer toute une variété de défenses qui peuvent entraver la maturation psychologique.

Malgré que ces trois sujets n’explorent pas à fond les principes sur lesquels l’Axiothérapie se fonde, ils fournissent une triade solide qu’il est possible d’observer dans toute une variété de cas. Le cas ci-dessous illustre ces trois principes d’Axiothérapie, et en même temps démontre quelques unes des nombreuses techniques caractéristiques de ce mode.

 

Le cas du Révérend Mr Sidney Miller

 

Mr Miller était un homme marié de 36 ans père de deux enfants. A l’époque du premier entretien, il était en service dans une paroisse de taille moyenne de confession Protestante. C’était une personne idéationnelle, intelligente et sociable qui s ‘exprimait  bien. Ces traits lui ont bien servi tout au long de sa carrière ministérielle.  Après seulement 3 ans comme pasteur associé après l’obtention de son diplôme, il a été appointé à son poste actuel, et à priori tout se passait bien. Il a décrit son problème comme étant d’ordre « sexuel ». Sa femme, Sue, était une femme attirante, de bonne éducation, et en apparence dévouée à la carrière de son mari. Mais depuis deux ans leur vie sexuelle était presque inexistante. Malgré que Sue ne se plaigne pas beaucoup de cette situation extrême, elle avait suggéré a plusieurs reprises qu’ils consultent un conseiller conjugal. Mais Sid refusait, et expliquait leurs difficultés comme étant une conséquence de son emploi du temps chargé, de sa fatigue à la fin de la journée etc…

Cependant, ces derniers temps, il ressentait une augmentation de fantasmes sexuels, la plupart étant par rapport  à certaines femmes de sa paroisse. Malgré qu’il ait réussi à éviter toute implication avec ces femmes, ses fantasmes commençaient à s’immiscer dans son travail, et il se sentait coupable et mal à l’aise.

Il n’avait pas parlé à Sue de ses fantasmes, et au moment de son premier entretien, il ne voulait pas qu’elle sache qu’il voyait un thérapeute.

Après deux séances d’entretien approfondi, et après avoir établi que Sid ne voulait pas consulter un conseiller conjugal, nous avons convenu que nous ferions trois séances de dés-identification et identification des sous-personnalités de Sid.

Pendant cette phase, il est devenu évident que le rôle ministériel de Sid ne faisait pas tant partie du concept de son Soi, mais plutôt de son être idéal. Il trouvait extrêmement difficile de visualiser la sous-personnalité de pasteur sous une autre forme qu’un reflet de son Moi profond. Plusieurs tentatives d’imagerie guidée ont produit essentiellement les mêmes résultats.

En même temps, chaque fois que Sid parlait de ses activités quotidiennes, il est devenu de plus en plus évident qu’il ne prenait pas forcément plaisir à beaucoup des tâches qui lui étaient assignées en tant qu’homme d’église. Malgré que les retours qu’il avait de ses sermons étaient plutôt positifs, il détestait généralement  les préparer. Il vivait sa participation au groupe de prière du mercredi soir comme un supplice ; il trouvait que le groupe était enfermé dans une procédure trop traditionnelle, ce qu’il ne tolérait pas. Malgré qu’il prenne un certain plaisir aux séances de conseils individuels, il avait beaucoup de mal avec les visites paroissiales et en milieu hospitalier. Il parlait en termes généraux de la noblesse d’être un pasteur, mais se plaignait continuellement de beaucoup des tâches  qu’il était appelé à accomplir en tant que pasteur.

Au cours de la sixième heure, j’ai demandé à Sid de me remplir le Sondage de Valeurs, un outil qui demande au participant de classer 18 valeurs essentielles et 18 valeurs clés. Ceci était accompli au cours de la session. J’ai demandé à Sid de « penser à voix haute » pendant qu’il effectuait le classement. Par moments, je l’ai encouragé à parler librement de son choix de telle ou telle valeur sur une autre, ou de pourquoi il hésitait sur les définitions de certaines valeurs. Dans le cadre de recherches, il faut environ 20 mn pour compléter le Sondage, mais utilisé de cette manière, Sid a mis presque deux heures pour arriver au bout.

Après que nous ayons revu la liste valeur par valeur, j’ai demandé à Sid de refaire le classement, mais cette fois en imaginant comment un membre typique de sa congrégation le complèterait. Après quelques faux départs, et un peu de résistance intellectualisée, Sid a refait le classement du point de vue de Mr Smoot, le nom qu’il a donné au membre typique de sa congrégation.

Pendant la dixième séance, nous avons comparé les deux en détail. Après une longue discussion, Sid a conclu que les différences entre son classement et celui de Mr Smoot étaient considérables. Au début, il avait l’air assez surpris, puis, vers la fin de la séance, Sid a dit qu’en fait «  les valeurs de Mr Smoot sont très semblables au classement que ferait ma sous-personnalité de pasteur. Mais ça ne me convient plus du tout.  Ce n’est tout simplement pas moi. »

La séance s’est terminée avec son engagement de passer un minimum d’encore trois heures à explorer l’incohérence apparente entre ses valeurs et son comportement. Il a passé le plus clair de son temps à formuler des instances spécifiques où son comportement ne semblait pas être en accord avec ses valeurs annoncées.

A une séance par exemple, il a exploré le fait que deux valeurs essentielles très importantes pour lui, le plaisir et la liberté, n’étaient pas très présentes dans la plupart de ses activités. Les attentes de ses fidèles le limitaient considérablement, et il se sentait enchainé plutôt que libre. Et il s’est vite rendu compte que son désir de plaisir était contraire à la plupart des choses qu’il devait faire, et était contradictoire avec quelques uns de ses enseignements théologiques.

En fait, son évaluation grandissante d’une vie plus agréable et détendue lui produisait un fort sentiment de culpabilité, puisqu’une telle revendication avait tendance à aller à l’encontre de quelques valeurs traditionnelles de sa confession, en particulier l’obéissance et la maîtrise de soi. Cette divergence entre ses valeurs et son comportement devenait de plus en plus évidente pour lui. C’était d’autant plus clair quand il a comparé la hiérarchie de ses valeurs avec celle de Mr Smoot, le membre « typique » de sa congrégation.

Après 10 séances d’Axiothérapie, Sid est entré dans une phase pendant laquelle il a confronté plusieurs des conflits implicites entre ses valeurs et l’orientation générale de ses valeurs. Il était nécessaire de régler l’anxiété générée par  la prise de conscience de l ‘étendue de la tourmente des valeurs dans sa vie. En explorant les rapports ente le Soi et la profession, il a abordé les manières possibles de synthétiser les différences entre ses valeurs personnelles et son comportement, et les valeurs qui lui appartenaient vraiment et celles qui étaient profondément enracinées dans son rôle clérical.

Pendant la phase finale du travail, Sid s’est rendu compte que la relation avec sa femme s’était nettement améliorée. Ils ont rejoint un groupe de parole conjugal, et ont travaillé sur certains de leurs problèmes de couple.

Sid à décidé de quitter le ministère réglementaire, et travailler dans les relations publiques. Il est à présent actif dans une autre dénomination religieuse, et relate une satisfaction grandissante dans son travail et ses relations amoureuses.

 

Conclusion

 

Il est nécessaire de souligner que malgré que l’accent premier dans le travail avec Sid était sur les valeurs, il n’y a eu aucune tentative de nier ou détourner des expressions qui ne pouvaient pas être correctement abordées avec ce concept. Mais même quand nous travaillions avec des sous-personnalités, la question était souvent : «  Quelles sont les valeurs de cette sous-personnalité à ton avis ? » Lorsque Sid s’est rendu compte que beaucoup des valeurs de quelques unes de ses sous-personnalités étaient en conflit, ne correspondaient pas bien avec son Soi, et détonnait considérablement avec se qu’il faisait, il a commencé à essayer de trouver une synthèse créative appropriée à ce monde. Tout ceci s’est déroulé avec les valeurs comme sujet central.

Avec le travail d’ancrage, où les déclarations de valeurs étaient sans cesse reliées à des évènements comportementaux spécifiques, Sid a commencé à se rendre compte comment ses valeurs s’exprimaient dans son comportement quotidien. Il s’est également rendu compte que certaines de ses valeurs citées étaient en fait faux, puisqu’ils ne pouvaient pas être honnêtement reliées à son comportement. A chaque fois que cet écart devenait évident, il a été capable de résoudre beaucoup de douleur et de conflits intérieurs.

Pour l’Axiothérapie en elle-même, plusieurs techniques ont été employées, y compris une bibliothérapie, , le Sondage de Valeurs ,  un cahier d’exercices psychologiques, la visualisation guidée, et les sous-personnalités. Par contre tous étaient modifiés en insistant sur les valeurs comme ligne directrice, ce qui dans ce cas s’est révélé particulièrement utile et en accord avec le milieu du patient.

Il est également important de souligner que le caractère relationnel des valeurs a joué un rôle important dans l’axiothérapie, car malgré que les valeurs étaient explorées comme faisant partie de Soi, elles ont été vues également comme étant interactionnelles.

En effet, une part importante de la compréhension du patient est apparue quand il a vu clairement que son système de valeurs déviait considérablement de l’institution religieuse qu’il exprimait dans son ministère. Le choix de Sid de sortir de ce système de valeurs ne s’est pas fait facilement ; il se peut que pour une autre personne un autre choix aurait été plus thérapeutique. Pour ce patient par contre, la philosophie de sont métier était trop conflictuel. Il avait beaucoup plus de chances de se réaliser dans un contexte professionnel.  Ce choix crucial, le choix des valeurs en lui-même, semble être à présent validé dans le contexte actuel de la vie du patient.